L'ours de Kodiak
Pour les Américains, et notamment pour William B. Leacock, biologiste spécialiste des Ours Bruns au Kodiak National Wildlife Refuge, il existe trois espèces d'ours :
le "black bear", l'ours noir
le "brown bear", l'ours brun
le "polar bear", l'ours polaire.
Et le grizzli, alors ?
Le grizzli est un ours brun qui vit à l'intérieur des terres.
Le terme d'ours brun est ainsi réservé aux individus qui vivent le long des côtes : ils sont plus gros que le grizzli, en raison d'une alimentation très riche en protéines, notamment constituée de saumons.
Quant au terme d'ours de Kodiak, ou ours Kodiak, il s'agit d'une sous-espèce de l'ours brun, qui du fait de son isolement sur l'île de Kodiak, séparée du continent par le détroit de Shelikof, n'a eu aucun échange avec l'ours du continent, depuis le dernier âge glaciaire, il y a 10 à 12 000 ans.
Localisation et dénomination
Il occupe les îles de l'archipel Kodiak, situé au sud-ouest du golfe de l'Alaska, face à la péninsule.
C'est la plus grande sous-espèce d'ours brun, dont la dénomination scientifique est Ursus arctos middendorffi, que les autochtones, les Alutiiq, appelent Taquka-aq.
Description
Avec l'ours polaire, Ursus maritimus, l'ours de Kodiak est le plus gros carnivore terrestre.
Le mâle, à l'âge adulte, mesure 1,50 m au garrot et 3 m de haut lorsqu'il se dresse sur ses pattes arrière ; son poids oscille entre 480 et 530 kg ; les femelles sont plus petites que les mâles, leur poids variant entre 250 et 350 kg.
Sa stature imposante est à peu près celle de son lointain ancêtre, l'ours des cavernes dont on a retrouvé des ossements dans les grottes de diverses montagnes en Europe.
La couleur du pelage varie du grisâtre au brun foncé, en passant par le beige; les oursons ont souvent un anneau de couleur blanche autour de leur cou, qu'ils garderont pendant les premières années de leur vie.
L'ours a une ouië et un odorat très développés ; sa vue est considérée comme bonne, permettant de distinguer les couleurs et les différents niveaux de lumière.
Les griffes sont habituellement noires mais peuvent être blanchâtres chez les spécimens plus âgés. Celles des pattes arrière sont plus courtes que celle des pattes avant. Elles lui servent à creuser ou à tenir ses proies, notamment le saumon.
Habitat
Il réside principalement dans les îles de l'archipel Kodiak, en face de la côte sud de l'Alaska.
Le climat sous-polaire avec des températures fraîches, du brouillard, des vents persistants ainsi que de fortes précipitations tout au long de l'année en font un endroit de vie idéal pour les ours.
A la fin de la dernière ère glaciaire, les glaces ont fondu, isolant les ours de Kodiak des autres espèces.
D'une superficie de 13 000 km2, l'île est riche en végétation variée : forêts denses d'épicéa de Sitka au nord, chaînes montagneuses au centre, toundra plate au sud ; en raison de l'abondance de nourriture, les ours n'ont pas besoin de grands territoires.
Environ 14 000 personnes vivent sur l'archipel, principalement dans la ville de Kodiak et des environs, et de six villages périphériques ; la moitié de l'archipel est incluse dans le Kodiak National Wildlife Refuge.
Alimentation
L'ours de Kodiak est un mammifère omnivore mangeant un grand choix de nourriture facilement disponible.
Après l'hibernation, il se nourrit de végéaux et de cadavres d'animaux morts pendant l'hiver.
Du début du mois de mai jusqu'au mois d'octobre, il se nourrit de saumons, aliment important dans son régime alimentaire ; chacune des cinq espèces de saumon du Pacifique remonte dans la majeure partie de l'archipel de Kodiak.
Mais il préfère se nourrir de végétaux, de baies, d'algues et d'invertébrés, ce qui lui demande moins d'effort.
Reproduction
Le taux de reproduction est relativement bas.
En effet, les mâles et les femelles atteignent leur maturité sexuelle vers l'âge de 5 ans, mais la plupart des femelles n'ont pas de progéniture avant l'âge de 9 ans.
En moyenne, une ourse peut mettre au monde 6 à 9 oursons au cours de sa vie.
La saison de reproduction a lieu pendant les mois de mai et de juin, peu après la première sortie de la tanière.
Lorsque le mâle repère une femelle réceptive, il s'agite et galope vers elle en laissant s'échapper des sons rauques audibles de loin ; ce petit jeu peut durer toute la journée. L'accouplement est très bruyant. Un autre mâle peut convoiter la même femelle, entraînant alors un combat laissant parfois de graves blessures.
Les ourses de toutes les espèces, sauf l'ours malais, présentent une adaptation connue sous le nom d'implantation retardée. En effet, l'ovule une fois fécondé ne se fixe à la paroi de l'utérus que lorsque la femelle sera prête, dans sa tanière, pour l'hiver. De cette manière, les ourses ont un état physique optimum pour la saison d'automne où elles pourront se nourrir abondamment avant la période de gestation.
Les ourses qui n'ont pas l'état physique nécessaire vont interrompre leur grossesse.
Les ourses enceintes creusent leur tanière à flanc de montagne et commencent à hiberner à la fin octobre.
Dans la tanière, la femelle met au monde, en janvier ou début février, entre 1 et 3 oursons, qui l'occuperont pendant les 2 à 4 années à venir. Les petits ne pèsent pas plus de 600 g à la naissance et n'auront qu'entre 6 et 9 kg lorsqu'ils quitteront la tanière pour la première fois en mai ou en juin.
En règle générale, une femelle ne se reproduit qu'une fois tous les 3 ou 4 ans, mais cela peut varier avec son âge, son état physique, la disponibilité de nourriture, l'activité reproductrice des mâles, mais aussi l'impact humain sur leur environnement.
En raison de la dominance des ours plus âgés et plus forts, les jeunes mâles sexuellement mûrs ne se reproduisent pas.
L'ours vit habituellement moins de 20 ans, mais la durée de vie peut atteindre 30 ans.
Cycle de vie au cours de l'année
Janvier : les ours sont dans leur tanière ; le métabolisme est ralenti.
Févier : les oursons sont nés.
Mars : certains mâles commencent à sortir de leur tanière, à la recherche de nourriture printanière.
Avril : les femelles solitaires commencent à sortir.
Mai : les oursons, pesant entre 6 et 9 kg, sortent avec leur mère, qui a perdu plus de 30 % de son poids pendant l'hiver.
Juin : les femelles se séparent de leurs oursons de 2 à 3 ans ; commence alors la période d'accouplement.
Juillet : les mâles et les femelle se "mesurent" dans le territoire de pêche au saumon.
Août : les ours se nourrissent de saumons et commencent à se nourrir de baies.
Septembre : les ours de l'année pèsent maintenant plus de 40 kg.
Octobre : les ours se nourrissent de saumons Coho ; les grands mâles peuvent peser alors jusqu'à 750 kg ; peu de femelles pèsent plus de 325 kg.
Novembre : les ours commencent à entrer dans leur tanière ; les ours de l'année ont gagné plus de 50 kg dans les 9 premiers mois de leur vie ; les femelles fécondées sont déjà dans leur tanière et l'implantation de l'embryon peut avoir lieu.
Décembre : les ours sont dans leur tanière pour y passer l'hiver.
Comportement
L'ours de Kodiak est actif tout au long de la journée, et même la nuit s'il n'a pas eu assez de nourriture.
Généralement placide et solitaire, il accepte la présence de ses semblables, notamment quand il pêche les saumons, mais les mâles préfèrent s'éviter et deviennent agressifs pendant la saison d'accouplement ou si la nourriture vient à manquer, tandis que les femelles sont plus conviviales.
Menaces
Il n'a pas de prédateur naturel, à l'exception de l'homme, certains étant tentés de mettre à leur tableau de chasse un des plus grands carnivores terrestres ; mais les permis de chasse sont difficiles à obtenir depuis que des lois protègent l'ours de Kodiak.
Conservation
A l'inverse de certaines espèces animales menacées d'extinction en Amérique du Nord, l'ours de Kodiak est une espèce saine, en augmentation numérique.
Selon l'Alaska Department of Fish and Game, il y aurait 3 500 spécimens dans l'archipel de Kodiak, la grande majorité de cette population vivant dans les terres protégées du Kodiak National Wildlife Refuge.
L'ours de Kodiak et l'homme coexistent sur l'archipel de Kodiak depuis presque 8 000 ans ; les ancêtres du peuple Alutiiq vénéraient et respectaient cet animal, bien qu'ils l'aient chassé pour sa viande, sa fourrure ou pour la confection d'outils.
Le système de chasse organisé de nos jours est conçu pour conserver une population stable au sein de l'écosystème.
L'observation des ours est une des activités les plus populaires de l'île ; la meilleure saison pour les voir a lieu pendant les mois de juillet, août et septembre : mais attention, ne perdons pas de vue que nous ne serons plus chez nous, mais que nous entrerons alors dans le territoire de l'ours de Kodiak, qui avec l'ours polaire est le plus grand carnivore sur terre.
Outre ce grand plantigrade, on peut rencontrer dans ce refuge faunique de Kodiak :
Cinq espèces de mammifères indigènes : le renard roux, la loutre de rivière, l'hermine, le campagnole nordique, la petite chauve-souris brune.
Des espèces importées entre les années 1920 et 1950 : la chèvre des montagnes rocheuses, le cerf de Sitka, le wapiti de Roosevelt, le lièvre d'Amérique, le castor du Canada.
Les cinq espèces de saumon du Pacifique et la truite.
Plus de 250 espèces d'oiseaux.
Sources
ursides.com
la gazette des grands prédateurs n°43 - février 2012 - pages 22-24